Wamja’s House

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You don’t haffi dread… septembre 9, 2009

j’avais prévu de poster sur une sitcom américaine mais j’ai préféré réagir sur un fait divers qui fait débat en Martinique et notamment chez moi où ça a chauffé autour du JT du soir ^^.
Sujet du jour : un proviseur à interdit l’accès de son lycée à tout élève portant des dreadlocks et à tout garçon portant des boucles d’oreilles. La communauté rasta à donc réagit en manifestant aujourd’hui devant le dit lycée. Le proviseur accepte finalement les locks (dreadlocks) sous condition d’aménagement de la coiffure -_-; « Aménagement de coiffure » c’est pas mal comme expression. Un jeune rasta qui avait été filmé alors qu’on lui refusait l’accès au lycée avait les cheveux attachés en queue de cheval, c’est déjà un aménagement en soit non ? Moi à sa place je reviendrais avec les cheveux enrolé dans le fameux foulard rouge vert jaune avec un lion dessuss (emblême suprême des rastas) XD

La réaction de mes parents était prévisible : « Il a bien raison, ces rastas, tous des voyous en plus, les locks ça fait sale »

Moi forcement je réagis, je m’énerve ect… Comme toujours l’étroitesse d’esprit des gens me sidère, et m’agace, même si l’ont n’est pas soit même rasta sympathisant ou pro-locks on peut quand même éviter de cracher sur les gens comme ça.

J’ai un peu réfléchi sur le sujet aujourd’hui : Ayant subit l’éducation chrétienne extra conservatrice de mes parents, je me souviens que qund j’avais 3 ou 4 ans j’étais effrayée par ces gens aux longs cheveux emmêlés, mes parents me disaient qu’ils étaient tous des voleurs et qu’ils étaient sales, alors forcement… Plus tard à l’école primaire j’ai eut une copine rasta et elle ne m’avait pas l’air sale du tout, je me souviens d’ailleurs avoir discrètement reniflé ses cheveux (les enfants je vous jure) après j’ai demandé comment on faisait ça, qu’est ce qu’on mettait dedans pour que ça tienne, et est-ce qu’il fallait souvent les laver (j’ai toujours été fouineuse sur les bords) et elle m’avait gentiment répondu que sa maman s’en occupait, qu’il fallait bien en prendre soin, qu’elle ne mettait que des produits naturels et qu’elle se lavait les cheveux comme tout le monde (sa mère vend d’ailleurs d’excellent soins faits maisons pour la peau et les cheveux) Après coup je me suis dit qua ça devait être chiant que les gens te posent des questions comme ça. Mais au moins après ça, ma peur des rastas s’est envolée, cette fille était très gentille, très calme, je me rappelle d’ailleurs qu’elle avait d’excellente notes.

Quelques années plus tard je l’ai croisé alors qu’elle se faisait draguer par des voyous qui avaient l’air de penser que parce qu’elle était rasta elle était comme eux. Et c’est là le noeud du problème, les rastas sont assimilé à des voyous, par la société et par les voyous eux mêmes.

Personnellement je vois plusieurs raisons à cela (mon développement est un peu long) Je précise avant de commencer que le rastafarisme vient de Jamaïque même s’il a des racines ethiopienne. Hailé Selassié est leur messie/Jah (pour plus de détail voir Wikipedia) et je suis en total désaccord avec cette philosophie qui prétends qu’il y aurait un dieu pour les blancs et un Dieu pour les noirs, pour moi il n’y a qu’un seul Dieu peu importe comment on l’appelle. Mais tout ça ne m’empêche pas d’avoir un avis objectif sur les rastas en Martinique…je crois.

Premièrement, dans 99,9% des cas les rastas fument de la marijuana, c’est tout simplement dans leur principes religieux, mais ça fait désordre. De plus les premiers rastas vivaient dans les bois, (certains y vivent toujours pour être plus proche de la nature) et d’après ce que j’ai compris ils ne se gênaient pas pour cueillir des fruits même si l’arbre appartenait à quelqu’un (c’est pas bien grave selon moi, mais ça a marqué les anciens comme mes parents qui ont eu du mal à comprendre que les gens qui faisaient ça considéraient que c’était un produit de la nature et que ça appartenait donc à tout le monde). Tout ça additionné à une coiffure peu conventionnelle les a rapidement marginalisé.

Puis est venu le reggae, une « musique de drogués », qui a malheureusement dérivé vers le reggae dancehall puis vers le raggamuffin, « musique de drogués sauvages ».
Pour vous donner une idée, ici les anciens voient le ragga comme les anciens voient le punk rock en Europe, d’ailleurs étymologiquement ça y ressemble vu que ça veut dire « hardes de bon à riens » ^^.
Plus jeune j’ai eu mon époque ragga mais comme le zouk ça m’est passé, j’ai fini par être lassée par la bêtise des textes. Le type de raggamuffin le plus populaire en Martinique ne parle principalement que de cul, de violence et de drogue, même s’il existe des artistes engagés ou plus romantiques. Je n’ai rien contre la musique en elle même, j’en ai écouté et j’en écoute quelque fois, mais je suis contre les messages que la majorité des toasteurs véhiculent par elle.

Après l’apparition du ragga et du rap, je ne sais pas comment il y a eu comme une expansion de la culture du ghetto, tout le monde veut faire ghetto, même si t’es un petit bourgeois tu veux faire ghetto, tu marche comme si tu avais une jambe de bois, tu parles en argot, tu t’énerves facilement… c’est la mode faut faire comme ça sinon tu fais chichiman ou macoumè (comprenez homo). Et c’est de pire en pire, il y a trois semaine j’ai failli me faire agressé par un gamin de 15ans parce que…j’ai pas bien compris en fait, je crois que je ne me suis pas poussé assez rapidement pour lui faire place à lui et les trois tonnes de chaînes en or qu’il portait au cou. Je fais la fière maintenant mais j’ai eu la peur de ma vie « Tuée par un mineur parce qu’elle bloquait le passage » cay pas très classe.

seanpaul1Un bourge qui fait du ragga et qui se la joue ghetto (ceci dit je l’aime bien)

Revenons à mon développement : Les jeunes voyous très friands de ragga (pour le côté violence, sexe drogue et « rock’n’roll ») ont commencé à porter les coiffures de leurs artistes préférés (jamaïcains et se disant rastas) c’est à dire des locks, des nattes et des tresses (ce que Sean Paul porte sur la photo), ce qui a rendu la société encore plus méfiante vis à vis des rastas et autres tréssés.

Pour ne rien arranger les voyous ou aspirants voyous ont commencés à se percer les oreilles et le nez, et à porter des tonnes de bijoux en or, parce que quand t’es mafia, t’as de l’argent (peu importe ce que tu fais pour en avoir) et tu peux t’acheter des bijoux pour montrer aux autres que tu en a.
C’est assez ironique de voir comme certains n’aiment pas les garçons à bijoux parce que ça fait homo et d’autres qui n’aiment pas pas parce que ça fait voyous.


Un petit exemple de ragga de chez moi avec des mecs de chez moi, j’en suis tellement fière… C’est en créole et j’ai pas vraiment envie de traduire, en gros c’est un hymne à la violence (ça commence par « Des gens vont mouriiiir ! » ça se poursuit avec des histoire de machette, de tête qui vont tomber ect…). Ce clip, tourné avec de vrais armes à ce qu’il parait, brille par son intelligence, et son engagement envers la jeunesse, j’apprécie particulièrement le passage où on voit un enfant tenir une arme à feu. J’ai vu ce clip pour la première fois chez un ami fan de ragga qui ne comprend pas toujours pas pourquoi ça me faisait honte quand il me déposait à l’arrêt de bus avec ce genre de musique à fond -_-

Ca c’est l’historique du truc, mais si on en vient à nos jours, les locks, nattes, tresses et boucles d’oreilles sont un phénomène de mode, les gars veulent toujours faire ghetto, ou « mafia » comme ils disent  avec leur coiffure. (je trouve ça ridicule comme expression), et les le diams à l’oreille ou au nez c’est juste stylé.
De nos jours il existe même des salons de coiffure spécialisés en locks et cheveux naturels qui propose de locker les cheveux et un entretien des locks qui donne un aspect plus « propre » et qui propose même des fausses locks que l’on peut garder jusqu’à un an (ça m’intéresse assez d’ailleurs mais ça doit coûter une fortune).

Miss Jamaïque 2007

De plus ces coiffures sont aussi un moyens de s’affirmer pour certains car on retrouve les locks/nattes un peu partout en Afrique ancienne et contemporaine, notamment en Egypte où les pharaon et leur faille en portaient. D’après ce que je sais on retrouve aussi des locks en Inde chez les ascètes et certains pratiquant du Bâul. Wikipedia dit d’autres chose mais l’article me semble fantaisiste.

C’est l’occasion ou jamais de vous faire découvrir le Bâul  qui fait parti de la tradition musicale bengali (Inde) pratiqué par une communauté de chanteurs itinérant. Voici une photo de Parvathy Bâul et un lien vers une vidéo où elle chante, c’est vraiment très profond comme musique.

Tout ça pour dire que les locks ne font pas le rasta, je ne crois pas que le rastafarisme prône la violence et assimiler les rastas à des voyous à cause de leur coiffure est injuste. En plus avec un peu de bonne volonté on arrive facilement à différencier un voyou, d’un rasta ou encore d’une victime de la mode.
Le proviseur pourra toujours se draper dans la laïcité pour se défendre puisque l’on a interdit tout signe religieux ostentatoire dans les établissements public..mais le rastafarisme n’est pas vraiment une religion alors ça revient à de la discrimination dans un établissement scolaire public et ça c’est très grave.

Voilà Voilà encore un article qui parle de cheveux, c’est quand même étrange comment chez nous le rapport aux cheveux est conflictuel.
Je vous laisse avec une touche musicale roots, You don’t Haffi Dread (To Be Rasta) de Morgan Heritage ne cherchez pas « haffi » dans un dico anglais, c’est du jamaïcain, j’ai traduit ça par Les dreadlocks ne font pas le rasta.